To block or not to block ?

 Nous avons tou.te.s été bloqué.e.s un jour ou l’autre sur un site de rencontres ou une app de messagerie. Et avouons-le, ce n’est pas très agréable, voire ultra violent ! Un peu comme si l’on vous claquait la porte au nez !

Mais que celui.celle qui n’a jamais bloqué également, jette la première pierre…

Le problème dans le blocage, c’est qu’il n’y a pas vraiment de règles et que les raisons d'être bloqué.e, blacklisté.e, restent parfois mystérieuses et toujours presque toujours discourtoises.

Il y a bien sûr le blocage évident. La personne en face est agressive, insultante. La discussion tourne au harcèlement. Par prudence, dans ces cas extrêmes de discussions fort désagréables, il vaut mieux alors bloquer toute communication. Jusque là, on doit tou.te.s être d’accord. Il y a quand même un paquet de gens qui trainent leurs névroses, voire leur psychose, sur les sites de rencontres. Pas forcément plus que dans la real life, mais caché.e.s derrière leur écran, ils.elles se sentent protégé.e.s et laissent plus facilement libre cours à leur hargne et frustration. 

Et puis il y a tous les autres blocages.

Le blocage intempestif. 

On entame une discussion et après quelques échanges tout ce qui semble de plus normal, on se retrouve bloqué.e sans aucune explication. Tout laisse à supposer que notre correspondant.e a trouvé l'herbe plus verte ailleurs... Mais le procédé manque singulièrement d'élégance. Imagine-t'on que dans la vie réelle, vous veniez de rencontrer une personne et d'engager la conversation et que l'un se lève sans un mot et parte ? Non. On invente un prétexte, une excuse et on file. OK, on ment mais l'on reste quand même courtois. Est il si compliqué de se fendre d'un petit message indiquant que visiblement l'on n'est pas sur la même longueur d'onde et qu'il est inutile de perdre son temps réciproquement ?

Il y a quelques jours, je commence à discuter sur Adopt avec un homme de manière tout à fait classique. Il me faire part de son désenchantement, qu'il n'a eu aucun rendez vous en 1 mois. On parle de nos boulots et il me dit qu’il travaille pour une SSI. Je ne suis pas vraiment sûre de comprendre alors pour manifester un intérêt poli, je lui demande de quoi il s’agit exactement. Et là, BING, bloquée ! Tu me bloques parce que je ne sais pas ce qu'est une SSII ?! Pas étonnant, chéri, que tu ne décroches aucun RDV !

Moi, je passe mon temps à expliquer en quoi consiste mon job mais je décroche des rendez-vous... (de préférence avec ceux qui comprennent ce que je fais...).

J'ai personnellement une petite formule que j'utilise lorsque je m'ennuie lors d'une conversation. Elle n'a rien d'original mais a le mérite d'être polie. Et n'est pas suivie d'un blacklistage, sauf insistance trop lourde de mon correspondant.

Je vais être honnête. Je ne pense pas que nous ayons les mêmes attentes. Je te remercie de cette échange et te souhaite de belles rencontres

Le blocage à géométrie variable. 

Il.elle nous bloque sur l’appli de rencontres mais pas sur WhatsApp, ou vice versa. Quel sens donner à cette demi-mesure ? La logique ici m'échappe.

Etourderie ? Il.elle a oublié qu'il.elle vous avait laissé son n° de téléphone ? 

Si la rencontre a eu lieu, il.elle ne coupe pas tout à fait la communication (on ne sait jamais, en temps de disette...) mais ne souhaite pas que vous puissiez voir qu'il.elle se connecte en continu à la quête de sa prochaine conquête ?

Il.elle vous bloque sur WhatsApp mais consulte votre profil LinkedIn (du vécu...) des mois plus tard et vous explique, quand vous l'interrogez via ce même réseau, que c'est par curiosité... Curiosité ? Regrets ? En maintenant la discussion ouverte via LinkedIn sans pour autant vous débloquez sur WhatsApp...

Le blocage arrogant.

C'est le blocage où votre interlocuteur.trice vous envoie un message long comme le bras vous expliquant qu'il.elle ne souhaite pas donner suite, à quel point vous ne lui convenez pas dans un luxe de prose inouie et qui vous blackliste dès que vous avez lu le message. Il s'autorise à vous en balancer plein la figure sans vous donnez la moindre possibilité de lui répondre. Il.elle fait preuve d'un tel ego qu'il estime que vous devez prendre la peine de le lire (regardez comme il.elle écrit bien) mais que votre réponse, votre parole, n'a aucune importance. C'est bien dommage parce que face à une telle arrogance, vous aviez dans votre escarcelle quelques arguments bien sentis pour lui rabattre son caquet !

Ainsi, G.M., si fier de sa zébritude (on en reparlera des 🦓 sur les sites de rencontres...) avec qui j'ai entretenu une longue correspondance, suivie de 2 rencontres à caractère plutôt sexuel, mais qui aurait pu faire un petit ami plutôt présentable, même si le potentiel charnel était encore à explorer (ce n'était pas non plus waouh !). Notre "relation" a donc du durer 2 ou 3 mois, dont une large partie durant le confinement. Au sortir du confinement, après un rendez vous volé, ce cher G.M. m'assène sa prose m'expliquant à quel point nous avions des affinités intellectuelles (je dois me sentir flattée ? Je n'avais pas trouvé tant que cela...) mais que cela ne se doublait pas d'affinités charnelles, que c'en était surprenant, et blablabla,...et m'impose le silence en terminant son message par un

je te remercie de ne pas me poser de questions et de ne pas me répondre.

suivi d'un blocage immédiat.

Je vous avoue que près d'un an après, je m'interroge toujours sur cette incompatibilité sexuelle qui semblait l'avoir rendu si radical dans son refus de communiquer...

Pour un code de bonnes conduites

La multiplication des modes de communication et de mise en relation semble avoir pris le pas sur nos comportements et nos bonnes manières. Comme si tous ces outils mis à notre disposition nous dispensaient de faire preuve de la même bienséance dont nous usons dans la vie sociale réelle.

A longueur de temps, sur les sites de rencontres, les utilisateurs.trices se plaignent de la virtualité des échanges. Pourtant, beaucoup entretiennent cette virtualité en adoptant des attitudes qu'ils.elles n'auraient jamais en face à face.

En fait, ils.elles agissent comme si les sites, les applis, constituaient un monde en soi, virtuel, hors sol, dégagé de toutes règles sociales, de cette courtoisie qui rend nos relations, de quelque nature qu'elles soient, apaisées et possibles. Ils en oublient que ce ne sont que des outils mis à notre disposition pour échanger, rencontrer. 

Je me demande si la rapidité avec laquelle ces outils ont envahi notre quotidien n'a pas bouleversé des siècles d'apprentissage de la courtoisie et de régulation des relations sociales et que notre cerveau n'a pas encore assimilé les manières de les utiliser et les intégrer à nos modes de communication.

Il serait peut être temps de réfléchir à notre comportement, de nous auto-éduquer, et d'éduquer nos enfants, à user de ces formidables outils tout en préservant ce qui constitue le fondement de l'échange mutuel et de nos sociabilités : le respect, la curiosité et l'écoute de l'autre.

J'ai souvent pensé que la politesse des manières était un remède contre la douleur des séparations

A l'est d'Eden - John Steinbeck

J'vais t'apprendre la politesse, p'tit con !
Catherine Frot



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